Approchez vous de l’hoatzin

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Si l’on trouve en Amazonie quantité d’oiseaux rares ou curieux dont on ne connaît l’équivalent dans aucune autre partie du monde, du point de vue de l’excentricité, celui-ci, l’Hoatzin de son nom Nahuatl, ou Shansho pour les péruviens d’aujourd’hui, tient la palme. Quand vous le rencontrerez, perché seul ou plus souvent par petits groupes en train de méditer silencieusement le soir, sur les branches d’un grand arbre surplombant un lac ou un cours d’eau tranquille, vous le prendrez pour une sorte de grosse poule bigarrée, à la face nue et bleue, aux yeux rouges qui vous dévisagent, coiffée d’une crinière hirsute et bicolore évoquant le bonnet à clochettes d’un bouffon du moyen-âge. Le corps est d’un brun riche ourlé de blanc, la partie inférieure des ailes rouge.
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Le vol est lourd et maladroit, et il faut s’approcher de bien près des oiseaux pour qu’ils consentent à quitter leurs perchoirs, émettant un cri d’alarme pareil à un feulement, et prennent un court essor qui les conduit sur un arbre voisin. Si les Hoatzins ne fuient pas l’homme, c’est parce que leur odeur déplaisante les rend immangeables, et que nulle part en Amazonie ils ne sont considérés comme un gibier. Cette mauvaise odeur, qui fait partie de leur arsenal de défense contre les prédateurs, semble liée à la structure de leur appareil digestif, analogue à celui des ruminants, qui leur permet de digérer les feuilles et les quelques fruits dont ils se nourrissent. L’Hoatzin est un végétarien exclusif et débonnaire, une sorte d’oiseau-vache de forêt-galerie qui regarde en rêvant passer les bateaux. Pour le voyageur, c’est une créature improbable, qui pose une touche rapidement familière et quand même insolite dans le concert amazonien. Pour les scientifiques, qui l’ont classé faute de mieux dans l’ordre des Cuculiformes, dont fait partie notre coucou, c’est un oiseau tout à fait passionnant, une sorte de preuve par neuf, de fossile vivant qui leur fournit l’image de ce que devait être l’ancêtre jurassique de tous les oiseaux, l’Archaeoptéryx. C’est que, comme l’Archaeoptéryx, le poussin d’Hoatzin a les ailes pourvues de griffes qui lui permettent d’escalader les branches basses des arbres lorsque l’approche d’un prédateur l’a contraint de se jeter à l’eau. Ces griffes ont fait couler beaucoup d’encre parmi les paléontologues. Elles ne sont pas héritées de l’Archéoptéryx, mais ont dû réapparaître secondairement au cours de l’évolution, dans une sorte de retour en arrière par dessus cent millions d’années, dans un contexte où elles présentaient un atout pour la survie. Quand le poussin en se développant devient capable de voler, les griffes tombent, ayant perdu leur utilité. Enfin, dernière bizarrerie chez ces volatiles hautement sociaux, les poussins, dans des nids toujours construits au dessus de l’eau, sont soignés et nourris de façon solidaire par tous les membres du groupe, auquel ils continueront d’appartenir leur vie durant.

Source photo: Wikipédia

Publié dans NOTRE ACTU, Photos LS
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