Il constitue le moyen de contacter les divinités et de recevoir par son intermédiaire leurs messages. Il lui permet aussi de soigner, de diriger son intention vers une personne ou un objet, de deviner le futur, ou encore contrecarrer les sorts jetés par les sorciers. Les plumes des rapaces concentreraient certains pouvoirs en raison de la faculté de ses animaux à voler au-dessus du paysage et de ses habitants, leur procurant une vue d’ensemble assimilée à la connaissance, à la force et au courage ainsi qu’à la protection que cela apporte.
Son origine mythique serait liée aux divinités de la chasse, le cerf Paritzika et l’Aigle primordial, ce dernier considéré comme le gardien du lieu des morts (Werika Wimari). Les flèches constituent un langage à la fois complexe et précis, à l’alphabet archaïque transmis par l’usage et s’adaptant aux évolutions et besoins de la société huichole. Leur fonction étant principalement celle d’un média entre les hommes et les dieux, ceux-ci sont déposés dans les lieux de cérémonies ou endroits sacrés, ou partie intégrante de la panoplie du mara’akáme jusqu’à ce qu’il s’en sépare pour des raisons multiples. Le langage du muvieri s’enrichit de l’accroche de « messages », comme dans les exemples suivants: • les tisseuses et brodeuses pour pouvoir bien vendre leurs produits, brodent un message en point de croix sur un petit tissu rectangulaire qu’elles attachent ensuite à la flèche. • pour réussir à la chasse, on attache à la flèche une corde torsadée, faite du même matériau que celui des pièges pour le cerf. • pour souhaiter devenir un musicien talentueux, il faut ajouter à la flèche un violon ou une guitare taillés en miniature. • en attachant au bâton un cristal de quartz, représentant l’âme des défunts, on peut souhaiter aux parents décédés la paix du repos. • les grandes plumes de rapaces comme l’épervier ou l’aigle préviennent des maladies. • les plumes bleues de pie ou jaunes de perroquet pour espérer une bonne récolte. • il est possible d’ajouter des étoiles à 4, 6 ou 8 branches, tissées avec du fil de coton blanc teint en bleu et jaune pour entrer en contact avec les divinités des points cardinaux et ceux de la Terre, du Soleil et de l’étoile du matin, suivant la forme et la conception de l’étoile. • si l’on souhaite faire une offrande aux dieux, celle-ci peut être attachée à la flèche, comme une petite bourse contenant du tabac. La légende veut qu’au tout début les Dieux disposaient de flèches, mais qu’ils n’arrivaient à tuer d’animaux. Le Grand Frère Cerf pensa qu’il s’agissait du matériel employé et prépara donc des flèches avec du roseau, mais en vain, il ne put que chasser un lapin. C’est alors que les dieux décidèrent de couvrir les flèches du sang du lapin chassé, ce qui fut plus efficace mais sans véritable satisfaction. Ils décidèrent de tuer un chevreuil et peignirent les flèches avec son sang. Ils purent ainsi tuer un grand cerf. De là, toutes les flèches cérémonielles furent couvertes du sang du cerf chassé, leur conférant la force de ce dernier. Depuis, cette pratique se perpétue. Les mara’akate, quand ils sont initiés, doivent recevoir leur premier muvieri des mains d’un ancien, d’un autre mara’akame ou directement des dieux au travers de leurs rêves. Le fragment de chant suivant provient d’une cérémonie de soin pratiquée par Don Agustín Montoya de la Cruz, un mara’akame de San Miguel Huaistita, dans l’état de Jalisco, en 1982. Il illustre parfaitement le dialogue que cherche à établir le praticien avec les dieux :
Traduction libre de W. Wadoux |